dimanche 25 décembre 2005

ORION SCOHY, VOLUME


Entre Bukowski et Raymond Queneau

Orion Scohy est un petit gars de 31 ans qui n'a pas grand chose à dire, mais qui crève néanmoins d'envie d'écrire un roman culte.

Excellent sujet. Il va donc écrire là dessus. Mais sur quoi ? Ben précisément, sur le fait qu'il n'ait rien à dire etc. etc.…

Ne vous attendez donc pas à un roman classique (un début, une histoire, un dénouement) puisque précisément ce n'en est pas un. Ainsi qu'Orion Scohy l'annonce lui même, c'est un bouquin sur la matière roman, sans être en soi une œuvre romanesque.

VOLUME constitue un joyeux patchwork pas toujours compréhensible, un prétexte pour faire se croiser un détective aux méthodes incertaines et qui visiblement ne sait écrire que des débuts de roman, un assistante unijambiste, un super héros à l'accent italo-espagnol à moins qu'il ne soit argentino brésilien (plutôt dur à décrire, l'accent argentino brésilien…) dont la cape magique aurait été dérobée par un pigeon malfaisant, et pour finir des acteurs d'un fantasmatique opéra farandole échangiste. C'est également un prétexte au plaisir de l'écriture tout simplement, un hymne à le beauté des tournures dignes de l'Oulipo de Queneau. Pour désamorcer toute critique sur côté burlesque de l'œuvre, il prévient : " Pas de panique, on n'est pas obligé de comprendre quoi que ce soit ». Nous voilà rassurés.

Après quelques digressions sur son nom – que l'on retrouve savamment distillé tout au long du livre tant « Orion, (son) nom, (l')oriente , comme une sorte de déterminisme sentimentalo-culturel qu'il s'impose à (lui) même» Scohy réussit à balader le lecteur incrédule pendant 460 pages tout en jurant la main sur le cœur qu'il ne se sent pas le moins du monde l'âme d'un écrivain. Cet ouvrage à base de roman (comment l'appeler autrement ?) est réinventé quasiment à tous les chapitres –les personnages improbables vivent et meurent au gré des fantaisies de l'auteur, l'échafaudage est fragile mais il tient on ne sait trop comment. Si on osait, on le comparerait volontiers à Bukowski, le poète maudit de la beat generation, dans les descriptions quelquefois un peu trash, avec une plume qui n'est cependant jamais départie d'autodérision.

C'est iconoclaste, profondément nombriliste, assez singulier pour provoquer des réactions extrêmes. On aime ou on déteste, mais on ne dit pas simplement « c'est pas mal pour un premier roman.

Si le pari est bien celui là, alors il est réussi, incontestablement.

JeanLuc GUSTAVE

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